Résumé de l’article de Gunder et Bodner

Comment les mouvements oculaires influencent les souvenirs désagréables : en faveur d’une explication par la mémoire de travail


Raymond W. Gunter & Glen E. Bodner
🔗 Lien vers l’article (ScienceDirect)

Résumé

 

La thérapie EMDR (désensibilisation et retraitement par les mouvements oculaires) peut diminuer l’intensité émotionnelle et la vivacité des souvenirs désagréables — c’est pourquoi elle est couramment utilisée dans le traitement du trouble de stress post-traumatique (TSPT).

Les expériences décrites dans cet article comparent trois hypothèses explicatives des bienfaits liés aux mouvements oculaires :

  • Expérience 1 : Les mouvements oculaires n’ont d’effet bénéfique que si le souvenir est activement maintenu à l’esprit pendant l’exercice. Ils augmentent aussi l’activation physiologique, ce qui contredit l’idée d’un simple réflexe exploratoire.

  • Expérience 2 : Les mouvements oculaires horizontaux et verticaux sont aussi efficaces l’un que l’autre, ce qui contredit l’hypothèse de communication interhémisphérique.

  • Expérience 3 : D’autres tâches distrayantes (comme la répétition auditive ou le dessin) produisent elles aussi des bénéfices, qui sont négativement corrélés avec la capacité de mémoire de travail.

👉 Ces résultats soutiennent l’hypothèse selon laquelle les mouvements oculaires sollicitent la mémoire de travail, en particulier la fonction exécutive centrale, ce qui réduit l’intensité du souvenir lorsqu’il est activé.

Synthèse de l’article : Gunter, R. W., & Bodner, G. E. (2008). How eye movements affect unpleasant memories: Support for a working-memory account. Behaviour Research and Therapy, 46(8), 913–931.

🔍 Objectif de l’étude :

Explorer les mécanismes à l’origine des effets bénéfiques des mouvements oculaires en EMDR sur les souvenirs désagréables, en testant trois hypothèses explicatives.

⚖️ Hypothèses testées :

  1. Hypothèse du réflexe exploratoire (investigatory-reflex) : les mouvements oculaires diminueraient l’activation physiologique.

  2. Hypothèse de la communication interhémisphérique (IHC) : les mouvements favoriseraient une meilleure intégration cérébrale.

  3. Hypothèse de la mémoire de travail : les mouvements solliciteraient la mémoire de travail, rendant plus difficile le maintien du souvenir à l’esprit.

🔢 Résultats principaux :

  • Expérience 1 : Les mouvements oculaires ne sont efficaces que si le souvenir est activé pendant leur exécution. L’arousal physiologique augmente, contredisant l’hypothèse du réflexe exploratoire.

  • Expérience 2 : Les mouvements verticaux sont aussi efficaces que les mouvements horizontaux, contredisant l’hypothèse de la communication interhémisphérique.

  • Expérience 3 : Les tâches distractives (shadowing auditif, dessin) diminuent aussi la vivacité des souvenirs, et leur efficacité est inversement proportionnelle à la capacité de mémoire de travail.

📊 Conclusion :

Les résultats soutiennent l’hypothèse de la mémoire de travail : les mouvements oculaires (et d’autres tâches concurrentes) mobilisent les ressources de la mémoire de travail, rendant plus difficile le maintien simultané d’un souvenir vivace. Cela réduit son intensité émotionnelle et sa vivacité. L’effet serait médié par la charge imposée à la fonction exécutive centrale.

💼 Intérêt pour les praticiens EMDR :

  • Confirme l’utilité de diversifier les tâches cognitives pendant le retraitement.

  • Soutient l’emploi de tâches duales dans l’EMDR 2.0.

  • Invite à considérer la capacité de mémoire de travail du patient comme facteur de personnalisation.

Marie-Agnès Thulliez

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